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Pour les professionnels du Community Management, la date du 24 février 2016 restera dans les annales. Elle marque l’arrivée d’une nouvelle palette de réactions qui remet en question la perception des contenus publiés sur Facebook et leur lecture par ses utilisateurs. Concrètement, l’internaute pourra élargir le champ de ses ressentis à propos d’un contenu posté par un ami ou une marque. Alors que depuis près d’une décennie, il ne pouvait « que » liker une publication, il peut désormais lui attribuer une émotion à choisir, désormais, parmi 6 réactions  :

Cette orientation, en expérimentation depuis plusieurs mois, répond à une attente exprimée depuis longtemps par les internautes : sortir du like simplificateur et donner un avis négatif à propos d’une publication par l’intermédiaire d’un bouton dislike. Si les marques ont parfois réussi à le créer (ce fut notamment le cas de la Licra en s’appuyant sur une création publicitaire originale), Facebook s’est toujours refusé à le proposer. Le dislike aurait été une rupture manifeste avec la philosophie positive du réseau social qui nous notifie lorsque nous avons un nouvel ami et ne nous prévient pas lorsque le contact disparaît. Avec 4 réactions positives (voir trois positives, une neutre et deux négatives si on considère le wow comme ambigu), la coloration de cette palette ne remet donc pas en cause cette philosophie. Elle pose plutôt de nouvelles questions quant à son appropriation par les internautes, l’utilisation des données qu’elle va générer et leurs interprétations par les professionnels du Community Management.

Comment Facebook va-t-il comptabiliser les réactions  ?

A l’évidence, c’est la première question que se pose les professionnels des réseaux sociaux. Avec les partages et les commentaires, le nombre de likes fait partie des données qui permettent d’établir le taux d’engagement d’une publication. Lorsque le Community Manager produit son reporting d’activité, il utilise cet indicateur pour illustrer le succès d’une publication auprès de sa communauté :

 

Avec l’apparition des réactions, la notion d’engagement va changer. Il ne suffira plus  de comptabiliser les likes mais également les loves, les hahas, les wows, les angrys et les sads (cela peut prêter à sourire je l’admets volontiers). La première conséquence de cette nouvelle grille de lecture se trouve être la vulgarisation de ces réactions. L’effort de pédagogie n’en sera que plus important lorsque le Social Media Manager rapportera le nombre de hahas ou de wows des publications de l’entreprise à sa direction pour étayer l’activité de ses Community Managers. Ces mêmes Community Managers vont également devoir pondérer les opinions positives, un love comptera-t-il plus qu’un like ? Ces 2 données seront-elle regroupées pour comptabiliser les retombées positives d’une publication ? Autant de questions qui restent encore en suspens tant l’apparition des réactions est récente. L’adaptation des interfaces statistiques de Facebook permettra sans doute d’en savoir plus sur la présentation des données liées aux réactions.      

On peut également penser que l’algorithme de Facebook, l’Edge Rank va intégrer ces nouvelles métriques d’opinion dans la portée des publications des pages fans. Une marque ou un média qui ne récolte que des réactions de tristesse ou de colère verra peut être la portée de ses futures publications baisser. On peut également supposer que réagir, même de manière négative, concoure à s’intéresser au contenu et donc à s’engager. En l’état, chaque réaction est comptabilisée comme un like par l’Edge Rank mais cela pourrait évoluer rapidement. Là encore, c’est dans un futur proche que nous pourrons tirer les conséquences de ce changement.

Le Community Manager, nouvel observateur de l’opinion ?

L’apparition des réactions va permettre de récolter plus rapidement, et de manière chiffrée, l’opinion des internautes et mobinautes à propos d’une publication. Leurs commentaires permettent déjà de l’identifier, des applications comme Synthesio ou la solution Radarly de Linkfluence parviennent à la déterminer, c’est néanmoins plus long et plus coûteux. Avec les réactions, un clic sur les emojis suffit à en connaître la composition :

 

Comme nous pouvons le voir dans l’exemple ci-dessus, l’accès à ces indices d’opinion se fait sans filtre de confidentialité. D’un point de vue fonctionnel, c’était déjà le cas avec les likes, néanmoins ils concentraient l’opinion dans un positionnement unique. De fait, liker une publication finissait par perdre son sens originel, il s’agissait d’une validation, d’une réaction molle sans réelle prise de position. L’apparition des réactions change la donne : l’opinion favorable retrouve du sens alors que l’opinion défavorable apparaît.

Même si il faudra du temps pour que les internautes s’approprient les réactions, nous convergeons, petit à petit, vers une nouvelle manière de prendre le pouls de l’opinion. Par exemple, lorsque le compte de la Maison Blanche relaie l’intervention de Barack Obama à propos de la fermeture de la prison de Guantanamo, il est possible de connaître l’opinion d’un panel d’internautes à ce sujet :

L’apparition des réactions datant de quelques heures, il est encore trop tôt pour déterminer dans quelle mesure elles permettront d’identifier des pools d’opinion. En fonction de la récurrence des réactions des internautes, on peut toutefois imaginer qu’il sera plus facile de déterminer des tendances. A Facebook de mettre les données collectées au service des marques et des institutions pour en faciliter l’interprétation et l’utilisation.

Pas d’accord en 1 seconde

Si l’opinion va donc être plus facilement lisible, elle va également se libérer : l’écrasante majorité des utilisateurs de Facebook ne commente pas les publications des pages fans qu’ils suivent (trop long, trop engageant,etc.). Avec les réactions, en 1 seconde, ils peuvent émettre une opinion favorable ou défavorable.

Dans un contexte d’infobésité et de scroll intempestif, il se pourrait que cette opinion ne soit pas réellement mesurée par les internautes. Comme le dit l’adage, il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler, de la même façon, il s’agira de réfléchir avant de réagir.

Quoi qu’il advienne, grâce aux milliards de nouvelles données générées par les réactions, Facebook pourra affiner ses profils d’internautes avec de nouveaux critères. Les internautes pourraient être identifiés en fonction de leur propension à réagir et donc les publications affichées dans leur flux d’actualité s’y adapteraient. Par exemple, un internaute qui réagit souvent par le biais du bouton Angry (colère) pourrait se voir conforté par Facebook dans son sentiment par l’intermédiaire de l’affichage de « publications colériques ». La zemblanité qui oriente nos navigations web n’en serait que renforcée, gageons que Facebook prenne le contre-pied de ce pronostique.

Quelles conséquences pour les entreprises  ?

L’apparition des réactions peut être l’occasion, pour les entreprises, d’intégrer les internautes dans la conception de leurs produits. Avant la sortie d’un nouveau produit, il s’agira de teaser sa communauté pour mieux comprendre ses attentes. La relation marque-consommateurs n’en sera que renforcée dans la mesure où ces derniers auront le sentiment d’être écoutés et d’être directement intégrés aux cycles de production.

Avec les réactions, l’opinion prend également une dimension publique. De fait, le comportement des internautes sera plus facilement lisible. Aux salariés, de prendre la mesure de cette nouveauté en maîtrisant leurs réactions, notamment lorsqu’ils évoquent leur entreprise et son environnement (secteur d’activité, concurrents, collègues, supérieurs etc.).

Plus généralement, le Community Management va devoir intégrer la dimension émotionnelle révélée par les réactions. En fonction de la saisonnalité de l’activité, de l’actualité ou du contexte d’achat (soldes, fêtes, etc.) les réactions des internautes pourront être observées et analysées. Le Community Manager aura ainsi l’occasion de rentrer en empathie avec sa communauté afin de comprendre ses attentes. Nous sommes à l’an 0 de l’émotion numérique, rendez-vous à la date de son premier anniversaire pour en mesurer l’évolution.