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691 058 : c’est le nombre de visiteurs qui se sont rendus au Salon de l’Agriculture en 2015. Evénement phare de la vie médiatique française, il rassemble politiques, grand public, éleveurs, marques et associations sous l’égide de la vie agricole. Si ces acteurs poursuivent des objectifs différents, ils utilisent les médias sociaux pour s’associer à l’évènement et pour prendre la parole. En ce sens, le Salon de l’Agriculture se meut en tribune numérique par l’intermédiaire de laquelle chacun pourra véhiculer son message. Outre ces aspects, le Salon de l’Agriculture est aussi un évènement physique qui se sert des outils du web social pour communiquer et faire communiquer. Il est donc un exemple intéressant pour qui souhaite mettre en oeuvre une stratégie digitale.

Dans cet article, je vous propose tout d’abord de s’intéresser à la stratégie digitale évènementielle du Salon de l’Agriculture. A travers l’exemple de la Banque Populaire, j’aborde ensuite le positionnement des marques et leurs techniques marketing comme le Newsjacking. Enfin, j’évoque les liens entre politiques et Salon de l’Agriculture, leur impact sur l’opinion et leur résonance sur les médias sociaux.

Une communication cross canal

En ciblant le grand public autant que les professionnels de l’agriculture, le salon se doit de communiquer sur plusieurs canaux. Il communique ainsi en son nom par l’intermédiaire de comptes Facebook, Twitter et Youtube :

En premier lieu, le Salon de l’Agriculture dispose donc de sa propre chaîne Youtube par l’intermédiaire de laquelle il propose un carnet de bord journalier :

Ce même contenu est publié sur la page Facebook du salon qui le réutilise sur un média différent :

Le nombre de vues (qui est une donnée publique) permet d’avoir un ordre de grandeur quant à la portée de la publication. Dans cet exemple, la vidéo compte 1887 vues. A ce sujet, il s’agit de ne pas comptabiliser les vues Facebook et les vues Youtube de la même manière. Plus de la moitié des vidéos publiées sur Facebook sont consultées dans les flux d’actualité sans le son, c’est à l’internaute de manifester un intérêt pour la vidéo en l’activant. Pour avoir une donnée d’intérêt crédible à ce sujet il convient donc de se référer à d’autres indicateurs. Sur Facebook, lorsqu’une publication intègre une vidéo, le Community Management accède à des statistiques détaillées.

Il est plutôt recommandé de se référer à des indicateurs comme la durée moyenne des vues ou la fidélisation de l’audience pour mesurer le succès d’une vidéo auprès des internautes :

Dans l’exemple ci-dessus, l’audience chute au bout de quelques secondes, de fait, il est nécessaire d’ajuster le contenu en conséquence.

Plusieurs éditions sur le même compte

Souvent, lors de la mise en oeuvre d’une stratégie digitale évènementielle des comptes éphémères sont associés aux évènements. Cette stratégie tend à disperser l’audience. Pour parer à cet effet, il est recommandé de garder le même compte et de communiquer à propos de l’évènement annualisé par l’intermédiaire d’un hashtag dédié. C’est la stratégie adoptée par le Salon de l’Agriculture dont le hashtag change chaque année (#SIA2013, #SIA2014, #SIA2015, #SIA2016, etc). Cette année, le salon va plus loin en designant une mascotte qui incarne l’évènement et en lui attribuant un hashtag #Cerise. Pour concentrer les conversations des professionnels, le salon a également créé un hashtag #SIAPRO2016. Les internautes et mobinautes sont invités à utiliser ces mots-clefs lorsqu’ils publient sur les médias sociaux :

En conservant un compte unique et en faisant varier les hashtags chaque année, les comptes réseaux sociaux du Salon de l’Agriculture voient leurs bases d’abonnés augmenter de manière continue. Naturellement, le nombre de publications est plus important lors de l’évènement comme l’activité du compte @salondelagri l’atteste (données Twittonomy) :

Ces données montrent que l’activité du compte est allée crescendo ces dernières années. A ce titre, le Salon de l’Agriculture illustre la progression des usages numériques et particulièrement de Twitter, un réseau social axé sur l’information et donc particulièrement en adéquation avec les communications inhérentes à cet évènement.

Selfie Agri

Pour compléter son dispositif, le Salon de l’Agriculture dispose de sa propre application. Par son intermédiaire, les mobinautes ont la possibilité de s’associer à l’évènement grâce à un selfie et ensuite de publier automatiquement l’image sur Facebook et Twitter :

Naturellement, l’idée est de relayer l’évènement par le biais de cette une promotion personnalisée.

L’agriculture à la sauce Newsjacking

Chaque année, le Salon de l’Agriculture prend ses quartiers à la porte de Versailles. Si il draine plusieurs centaines de milliers de visiteurs, il est aussi un marronnier, une actualité qui concentre énormément de retombées média. Dés lors, les marques profitent du bain médiatique inhérent au Salon de l’Agriculture pour communiquer et se servent des médias sociaux à ces fins. C’est notamment le cas de la Banque Populaire qui utilise Instagram, Facebook, Linkedin et Youtube pour diffuser une série de témoignages d’agriculteurs. Ces témoignages ont été enregistrés dans le cadre du Prix National de la Dynamique Agricole et de la Pêche.

La banque a choisi le hashtag #AgriculteurduFutur pour décliner sa campagne :

https://www.youtube.com/watch?v=Mzm4WJHcfiM#t=21

Ce format « témoignage » est un contenu émotionnel qui amène l’audience à entrer en empathie avec les agriculteurs. Il peut être adapté à des campagnes TV mais également à des médias sociaux grand public comme Facebook.

Le bruit des hués

Le Salon de l’Agriculture est, aussi et surtout, un incontournable dans l’agenda des politiques. A travers le prisme des métiers de l’agriculture, toutes les régions françaises y sont représentées, peu d’évènements assurent pareille représentativité. Si l’agriculture reste le principal fil conducteur de l’évènement, le salon sert également de lieu de rendez-vous entre France rurale et politiques. Il s’agit alors de créer ou de maintenir un lien avec les agriculteurs qui constituent une manne électorale non négligeable. Pour les membres de l’opposition qui aspirent aux responsabilité, c’est le temps des propositions notamment à propos de la PAC dont le budget français se chiffre à 55.2 milliards d’euros sur la période 2014-2020. Son montant et sa répartition sont des enjeux qui amènent les politiques à se positionner. A ces fins, les médias sociaux en général, et Twitter en particulier, servent à relayer ses positions  :

Quand l’opposition propose, l’exécutif rencontre et jauge de sa côte de popularité auprès des corporations agricoles. A l’occasion de la 53éme édition du Salon de l’Agriculture, ces rencontres virent à la confrontation entre 2 mondes qui ne se comprennent plus. En échangeant avec les agriculteurs aux abords du Salon, j’ai constaté qu’ils ne souhaitent plus être maternés par les subventions de la PAC, ces aides directes ont pour effet de les culpabiliser et de déprécier leurs activités aux yeux de l’opinion. Ils souhaitent majoritairement sortir de ce système et évoluer dans un marché équilibré qui se rapproche d’une concurrence pure et parfaite. En Allemagne, la majorité des produits agricoles sont issus de l’agriculture biologique. Grâce à des normes de production allégées, le bio y est développé à grande échelle. Les normes de production allemandes ne correspondent pas à celles qui sont appliquées par les agriculteurs français. En France, elles répondent à un cahier des charges beaucoup plus exigeant. On peut considérer que pour produire à moyens égaux, il faudrait que les normes de production soient les mêmes pour tous, sans quoi le coup de production diffère. Je simplifie volontairement l’équation et, surtout, je n’ai pas la prétention de synthétiser un problème si complexe. Néanmoins si ces retours ne suffisent pas à expliquer la situation, ils sont ceux d’agriculteurs incompris, qui ne voient pas comment produire plus efficacement. Ils génèrent de la colère et provoquent des tensions. Des tensions dont la captation, la diffusion et la consultation ne sont plus l’apanage des médias de masses à l’heure où chaque mobinaute peut être un média.

Cette semaine, Président de la République et Premier Ministre se sont exposés à ces tensions qui ont gagné quasi-instantanément les médias sociaux. C’est d’abord François Hollande qui essuie sifflets et quolibets à l’occasion de l’inauguration du salon :

Dans cette séquence, visionnée près de 170 000 fois sur Youtube et partagée en masse sur Twitter et Facebook, on ne distingue que très sporadiquement le Président de la République. Elle est un magma de contestation qui finit par trouver une large audience et cristallise l’impopularité de François Hollande. Plus abstrait, la quasi-invisibilité du Président de la République ainsi que les hués et sifflets qui lui sont destinés pourraient être considérés comme une métaphore de sa gouvernance.

Dans un contexte semblable et dans le cadre d’un dialogue avec un éleveur, Manuel Valls est, quant à lui, visible :

A la différence de François Hollande, il affirme sa présence et tant à démontrer qu’il assume sa fonction (Vous avez le Premier Ministre en face de Vous). Comme souvent, il adopte une posture volontariste et utilise un champ lexical inhérent à l’action (Faire avancer le schmilblick , On agit). Malgré l’opposition de son interlocuteur qui assaisonne la séquence, il s’en sort mieux que le Président de la République pour une audience près de 10 fois moins élevée.